"Mommy" de Xavier Dolan (2014)

Renverser la pyramide !

Un jeune garçon libéré de l'emprise de trois adultes, cour dans un couloir immaculé, poursuivit par trois hommes habillés de blanc. Un sourire se dessine sur son visage lorsqu'il aperçoit sa seule porte de sortie : une fenêtre. Fuir est donc la seule manière d'échapper à une société oppressante, étouffante et castratrice ?

Diane, son fils Steve et Kyla leur voisine, sont des déchets de la société. La première est au chômage, usant de son corps avantageux pour survivre, le deuxième est traumatisé par la mort de son père, déborde d'énergie qu'il met au compte d'une certaine violence et à une fâcheuse tendance à l'inceste, la troisième est une ancienne prof dépressive et bègue. Ces rebuts de la collectivité n'ont de choix que de s'allier pour faire face au compresseur de la société. Leur coalition verra le jour un soir suivant un combat opposant Steve et sa mère. Kyla sera le ciment de cette alliance et On ne change pas de Céline Dion sera leur hymne. Ils signeront ce pacte en dansant et chantant, bref en se libérant et en s'amusant.

Cependant les membres du trio auront du mal à bien s'entendre avant l'harmonie parfaite, car pour que l'alliance ait lieu il faut que le membre le plus incontrôlable, Steve, sache maîtriser ses violents accès de rage et ses pulsions sexuelles incestueuses. Kyla lui apprendra le respect puis les excès de violence de Steve seront oubliés pour se transformer en joie de vivre. Diane retrouvera ensuite du boulot et Kyla aura de plus en plus de facilité à parler. Mais la société ne se laissera pas déstabiliser très longtemps. Elle resserra ses griffes sur ces énergumènes, et les étouffera dans le cadre.

Dolan utilise un format spécial pour ce film puisque l'image est verticale, à la façon des smartphones. Ce cadre spécial sépare les personnages, les divises. Il ne permet de cadrer qu'un visage à la fois, il n'y a pas de cohésion entre les protagonistes. Cependant lorsque notre trio aura atteint son heure de gloire, Steve n'aura aucune peine à repousser les bords du cadre pour réunir les membres de l'alliance dans une seule image, facilitant ainsi leur communication. Mais le cadre se refermera encore sur eux pour ne s'agrandir qu'au moment d'un rêve.

Xavier Dolan affronte tout autant les codes du cinéma que les personnages combattent ce de la société. Il envoie balader la règle du cadre fixe et donc celui du respect du format. Il nous rappelle que les normes ont été ériger pour les contourner. Malgré tous nous ne pouvons gagner contre une armée supérieure en nombre. Dolan se dit que pour échapper aux normes de la société il faut franchir une fenêtre, mais qu'y a t-il derrière ?

Vivien Soldé

Comments

[L]

Je vais commencer ma critique par ce que je ne comprends pas de ce descriptif :
"sont des déchets de la société" Woow quel terme fort ! Ayant vu le film je ne les vois pas comme des déchets mais comme des personnes ayant des problématiques qui font obstacles à leur inclusion. Cela ne signifie donc pas pour moi qu'ils sont à jeter vulgairement à la poubelle...

" les excès de violence de Steve seront oubliés pour se transformer en joie de vivre. " Ah bon ? oublié ? Certes Steve arrive peu à peu à contrôler ses excès de violences mais cela ne signifie pas qu'ils sont oubliés ! C'est d'ailleurs pour cela que ce jeune homme est contraint par finir enfermé...

"Malgré tous nous ne pouvons gagner contre une armée supérieure en nombre" --> c'était donc ça l'objectif de ce film : la société contre les "déviants" ? Je ne l'ai là aussi pas compris de la même façon... pour moi ce film montre bien la difficulté de s'occuper d'un enfant qui a des troubles du comportements à tendance agressive... et ce film est très réaliste, il nous montre que malgré tous les efforts réalisés, il n'est pas toujours possible de vivre au contact de ces troubles envahissants du comportements. Car même si Steve parvient à se contrôler quelque peu, il n'en ait pas moins que sa violence persiste et il en arrive à soit mettre autrui en danger, soit lui même. Une mère se doit de protéger ses enfants et elle se rend compte que cela ne sera pas possible à long terme. Et si elle fait appel à une institution, c'est qu'elle finit par se résoudre, malgré elle, qu'elle n'y arrivera pas seule. Steve le comprend également mais ne peut accepter de vivre de cette façon... et la fenêtre semble sa seule issu.
Alors oui, les méthodes employées par l'institution sont des plus aberrantes, cependant pointer du doigts la société et ces personnes comme étant des déchets me parait très non seulement simpliste mais aussi très déroutant !